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L’Armée du crime de Robert Guédiguian

dimanche 11 octobre 2009, par Luc Landfried, Thibault Lebert


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L’Armée du crime

Synopsis

Dans Paris occupé par les allemands, l’ouvrier poète Missak Manouchian prend la tête d’un groupe de très jeunes juifs, Hongrois, Polonais, Roumains, Espagnols, Italiens, Arméniens, déterminés à combattre pour libérer la France qu’ils aiment, celle des Droits de l’Homme. Dans la clandestinité, au péril de leur vie, ils deviennent des héros. Les attentats de ces partisans étrangers vont harceler les nazis et les collaborateurs. Alors, la police française va se déchaîner, multiplier ses effectifs, utiliser filatures, dénonciations, chantages, tortures... Vingt-deux hommes et une femme seront condamnés à mort en février 1944.

Dans une ultime opération de propagande, ils seront présentés comme une Armée du crime, leurs visages en médaillon sur un fond rouge placardés sur les murs de toutes les villes du pays. Ces immigrés, morts pour la France, entrent dans la légende. C’est cette belle et tragique histoire que raconte le film.

L’avis critique de Luc Landfried

Alors que sort sur nos écrans Le ruban blanc où Mikael Hannecke tente de découvrir les origines du nazisme, le cinéma, en cette rentrée 2009, s’intéresse encore (et toujours !) à la dernière guerre mondiale. Après le délirant Inglorious Basterds, voici le film qui tenait à coeur à Robert Guédiguian : L’armée du crime. De quoi s’agit-il ?

Au début des années 1940, la résistance face à l’invasion nazie s’organise. De nombreux jeunes venus de l’Europe entière font le voyage à Paris pour rejoindre le groupe créé par l’arménien André Manuchian (Simon Abkarian) et sa femme (Virginie Ledoyen). Leur groupe sera qualifié "d’armée du crime" par les nazis. Grâce à un commissaire français retors (Jean-Pierre Darroussin), le groupe sera bientôt démantelé.

Qui d’autre que Robert Guédiguian pouvait décrire ce groupe de résistance arménien qui s’est illustré à Paris dans les années 1940 ? Le cinéaste avait déjà retrouvé ses origines arméniennes dans son film précédent, le bouleversant Voyage en Arménie avec Ariane Askaride et Simon Abkarian, qui joue cette fois le rôle principal. Il a une présence forte et impressionnante. Sa jeune épouse est interprétée par Virginie Ledoyen, qui quitte ainsi ses rôles d’éternelle adolescente pour interpréter (enfin !) une femme déterminée et forte, très émouvante. Mais l’essentiel de la distribution est donné à de jeunes acteurs qui jouent des résistants venus de l’Europe entière. Ils sont beaux et touchants. Leur arrestation à la fin nous fait couler une larme à chaque scène. Le film est beau, sombre et tragique, exactement l’inverse de Inglorious Basterds de Quentin Tarentino qui était une grosse farce, massacrant l’histoire.

Voir les deux films à quelques semaines d’intervalle crée un contraste saisissant. Les deux, longs (2h30) et passionnants dévoilent la même facette de notre histoire sombre (même lieu : Paris, même époque, le début des années 1940, même esprit de révolte contre l’occupant nazi).

Deux films importants et magnifiques, à voir et à revoir.

L’avis critique de Thibault

Thibault Lebert

Au travers de L’Armée du Crime, Robert Guédiguian rend hommage à ceux qui sont depuis devenus les martyrs de l’Affiche rouge et se pose sur la destinée aussi héroïque que tragique de ces hommes, ayant donné leur vie pour la France. Difficile de faire mieux que L’armée des Ombres de Jean Pierre Melville en matière de film sur la résistance française. Robert Guédiguian le sait et préfère se concentrer sur le moment du choix de la lutte armée, de la violence et de la résistance active.

L’Armée du Crime contribue au devoir de mémoire, en se penchant sur ces résistants qui, bien qu’étrangers, se sont battus pour la France contre l’occupant allemand au prix de leurs vies et d’atroces souffrances. Guédiguian a pris le parti de rappeler les motivations de tous ces partisans étrangers (juif, hongrois, polonais, italiens, arméniens...). Les membres de la bande de Manouchian sont montrés avec leurs failles et leurs doutes. Le film historique est de bonne facture. La mise en scène parvient à nous plonger dans l’atmosphère oppressante d’un réseau de résistants où le doute, la peur, la suspicion et le sacrifice sont exposés sans pathos ni héroïsme de propagande. La société française sous l’occupation n’a jamais été aussi bien dépeinte au cinéma : face aux jeunes résistants idéalistes, on découvre de vrais collabos, des faux, des opportunistes, de gentils Allemands et des méchants. Déroutant dans ses premières minutes, pour cause d’intrigues éparpillées, le film de Guédiguian se resserre progressivement autour de cette armée de l’ombre vouée au sacrifice.

L’armée du crime raconte le courage, insensé, d’hommes et de femmes qui luttèrent pour la liberté d’un pays au prix de leur propre vie. C’est un film à montrer à tous ceux qui ont tendance à oublier le passé. Il tend un miroir à la France d’hier et d’aujourd’hui. Un excellent film, réaliste qui ne cherche absolument pas à faire des membres du réseau Manouchian des super héros mais qui montre une réalité brute et dure. Un long métrage qui, comme l’a dit Robert Guédiguian, est important pour se souvenir mais aussi pour préparer l’avenir.

Mais il souffre de longueurs. L’exposition initiale des protagonistes est d’une lenteur sans nom. L’émotion a du mal à nous atteindre et l’histoire manque d’envergure et de souffle politique qui faisait le prix des films de Costa-Gavras. La violence est quelque peu lisse, la souffrance aussi. De plus, il existe quelques maladresses et anachronismes. Le réalisateur s’en excuse à la fin du film. Au début du déroulement de l’histoire, les journaux annoncent la rupture du pacte germano-soviétique (juin 1941), et quelques séquences plus tard, on voit l’instauration du port de l’étoile jaune (instaurée en mai 1942). Certaines ellipses sont maladroites.

Le casting est très réussi et ne pointe aucune faiblesse marquante. Simon Abkarian est très juste. Il est vraiment taillé pour le rôle. Virginie Ledoyen est éblouissante et toujours aussi splendide. Jean-Pierre Darroussin est impeccable en flic ambigu, entre salaud et blasé. Lola Naymark crève littéralement l’écran.

Un hommage à la bravoure, un véritable devoir de mémoire, si ces mots là ont encore un sens aujourd’hui.

Fiche Technique

Genre : Historique

Nationalité : Française

Réalisation : Robert Guédiguian

Casting : Simon Abkarian, Virginie Ledoyen, Robinson Stévenin, Grégoire Leprince-Ringuet, Lola Naymark, Jean-Pierre Darroussin, Ariane Ascaride, Adrien Jolivet, Yann Tregouët, Ivan Franek, Olga Legrand, Gérard Meylan, Boris Bergman, Patrick Bonnel, Robert Guédiguian, Esteban Carvajal Alegria, Pierre Niney, Lucas Belvaux, George Babluani, Miguel Ferreira, Mirza Halilovic, Horatiu Malaele et Léopold Szabatura

Durée : 139 min

Année de production : 2008

Budget : 9 200 000 euros

Attachée de presse : Marie-Christine Damiens

Date de sortie : 16 septembre 2009

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