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Un coeur simple de Marion Laine

lundi 21 avril 2008, par Thibault Lebert


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Un coeur simple de Marion Laine

Synopsis

Félicité est une femme qui consacre sa vie aux autres. Sans abnégation mais avec l’amour immense dont elle est dotée et qu’elle offre à ceux qui ont la chance de la croiser et de la comprendre. Elle aimera successivement et avec une même intensité Théodore qui la trahira, Clémence dont l’affection lui est interdite, Victor qui va disparaître, Dieu qu’elle découvre tardivement et pour finir Loulou, un perroquet. Au centre de cet univers se tient Mathilde, sa maîtresse, la clé de voûte d’une vie qu’elle se construit avec détermination.

L’avis critique de Thibault

Thibault Lebert

Le cinéma français nous offre encore un bon moment. Cette fiévreuse adaptation de l’un des trois plus beaux contes de Gustave Flaubert est époustouflante de justesse et de subtilité. Non seulement Marion Laine a relevé le délicat défi de l’adaptation d’un texte culte mais elle a su imposer d’emblée une esthétique qui prend à la gorge. Evitant tous les pièges de la reconstitution conventionnelle, elle guide notre regard au plus près des personnages, grâce à une direction d’acteurs impeccable qui nous permet de retrouver la Sandrine Bonnaire de Pialat et de Varda. Jusque dans le moindre détail, grâce à la délicate lumière de Guillaume Schiffman, Marion Laine traque les basculements et les failles. La fable sociale se transforme en peinture d’une magnifique relation entre Madame Aubain et Félicité.

Félicité, la si mal nommée, est une martyre de l’amour. Trahie par celui qui se prétendait son fiancé, elle entre au service de Madame Aubain. Son exceptionnelle capacité à aimer va la faire s’attacher avec passion à la jeune Clémence Aubain, puis, l’enfant partant pour le couvent, à son neveu dont elle ignorait jusque-là l’existence.

Cultivant l’art de l’ellipse, s’attardant sur des détails chargés de sens, la réalisatrice peint le portrait de trois femmes seules et égarées, la maîtresse, sa fille, et sa servante. En fin de récit, le rapprochement de Félicité et Mme Aubin est d’autant plus poignant qu’on a souffert avec elles. Nulle afféterie de mise en scène, mais l’extrême précision de scènes intimistes, naturalistes ou lyriques, le frémissement des arbres cernant les corps des héroïnes, la sécheresse d’un montage serré, qui élimine le gras pour ne suivre que les sentiments.

Rarement un premier film n’a paru aussi maîtrisé, jusque dans ses audaces. La scène où Félicité brasse l’eau avec les mains comme si elle y découvrait la fluide texture de son âme mêlée au flux insaisissable du temps est un pur moment de cinéma. L’agonie de Félicité est admirable elle aussi, avec sa musique des gouttes d’eau dans les bassines à laquelle se joint le choeur friable des vierges défilant dans la rue, que vient clore l’apparition spectrale de Loulou, rendant ainsi justice aux dernières lignes du conte de Flaubert.

Marina Fois s’en sort à merveille dans un registre inhabituel et conforte sa position depuis Darling. Sandrine Bonnaire illumine le personnage avec son habituel talent, pauvre fille de ferme qui ne sait ni lire, ni écrire, au visage ingrat, à la violence incontrôlée, mais avec une grande richesse d’âme. Elle donne une dimension et une profondeur à son personnage, que seule une grande comédienne pouvait lui donner. Elle se faufile dans son rôle avec une justesse rare, elle joue... elle est ce cœur simple.

Un très beau film.

Fiche technique

Genre : Drame

Nationalité : Française

Réalisation : Marion Laine

Casting : Sandrine Bonnaire, Marina Foïs, Pascal Elbé, Patrick Pineau, Noémie Lvovsky, Louise Orry-Diquéro, Romain Scheiner, Jean Senejoux et Johan Libéreau

Durée : 105 min.

Année de production : 2007

Date de sortie : 26 mars 2008

N° de visa : 112 639

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